2009. C’est la lutte finale.
Devant l’usine, des dizaines de salariés en gilet fluorescent manifestent, banderoles en mains, refusant de voir leur gagne-pain fermer ses portes.
Derrière la vitre du bus, je suis bouche bée en regardant cet immense complexe, cette haute cheminée, j’imaginais les machines, les cuves. Je pensais à ce que pouvait ressembler cet endroit, à l’abandon. Toute cette surface, digne du décor d’un film post-apocalyptique.
Pourtant, la structure est historique. Déjà en 1926, nous pouvons voir que l’ensemble est déjà là, et on observe même l’ombre de la grande cheminée. Les cuves ne sont pas encore installées, il y a des bâtiments à la place. En 1947, la structure ne change pas, on reconnaît au fond la bastide avec son bassin (j’ai dû couper la photo qui localisait le lieu). En 1957, les bâtiments de droite (emplacement actuel des grosses cuves bleues) commencent à tomber en ruine et à s’écrouler.
Une première cuve commence à apparaître vers le début des années 1970, et en 1985 les ruines sont démantelées. C’est finalement au début des années 2000 que les autres cuves seront construites. Voici les comparaisons suivant les années (source geoportail.fr) :
Quelques mois plus tard après mon passage, le capitalisme obtient gain de cause. Cette usine, produisant divers acides, acides tartiques, acides sulfuriques, acides aminés (heu … non …), ainsi que des crèmes glacées (whaaaaaaat ????) fermera définitivement ses portails, laissant sur ses murs les slogans déterminés de ceux qui ont su la maintenir en vie depuis 1748. Gouffre financier d’après les anciens dirigeants, véritable danger écologique, tout s’arrête là.
En 2012 je commence à m’intéresser à l’urbex et pense directement à cette usine. Mais elle semble impénétrable et on me déconseille vivement d’y aller, elle aurait été occupée. Des âmes courageuses diplômées de course à pied et escalade m’ont fait état de types en quad et de chiens qui ne réservaient pas d’accueil favorable.
Puis depuis un an le ton change, l’usine ne serait plus occupée. Et là, je me décide à foncer.
L’extérieur est vraiment un régal, les anciennes cuves d’acide sulfurique me font penser à la map « Pipeline » du jeu « Urban Terror ». On y tourne un clip électro dont le son fait penser à Vitalic, sans être lui. Il y a une jolie bastide, qui garde encore de sa beauté, même en étant graffée. Car il y a eu du passage.
Malheureusement, les intérieurs sont condamnés. Ainsi que les machines les plus intéressantes de l’usine. Frustrant, d’autant plus que ça fait plus de cinq ans que j’attendais avec impatience de pouvoir franchir le portail.
Mais j’attendrai encore. L’urbex c’est parfois une question de patience, dans une certaine limite. Car à mon avis, il reste peu de temps avant de voir cette usine tomber sous les pelleteuses, j’ai déjà remarqué quelques carottages de mauvais augure.
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