Il y a des occasions comme ça, où le temps nous est laissé et on se dit « pourquoi pas faire un petit trip dans un des plus beaux spots du pays ? » … profitons de la vie ! Je pars là comme ça, à des centaines de kilomètres, seule dans ces lieux enchanteurs. Cependant, non sans appréhension car le spot très connu (trop connu) porte également la réputation d’être surveillé ! j’ai eu des témoignages de quelques personnes qui à peine entrées se sont fait jeter dehors manu militari …
Important : l’urbex est une pratique dangereuse. J’ai presque 10 ans de pratique derrière moi et je sais quels lieux sont « safe » à visiter en solitaire, je préviens des proches, et je ne prends pas de risques inconsidérés comme je vais le décrire par la suite. N’explorez jamais seul de votre côté, et surtout JAMAIS la nuit !
Pour la petite histoire cet établissement a connu de belles heures de gloire jusqu’à la fin des années 90. Les curistes venus de toute part (dont certains TRÈS connus, comme Louis Pasteur !) affluaient pour goûter aux bienfaits de la source. Le souci c’est que de nos jours les établissements thermaux offrent peu d’accessibilité, les travaux sont trop coûteux, et pour le même prix les gens préfèrent s’offrir des cures au Maroc … Je ne peux pas en dire plus sur les multiples rachats pour ne pas griller la localisation, mais c’est passé entre les mains de propriétaires plus ou moins fortunés, et le dernier rachat date de l’année dernière.
Visite des thermes
Donc nous y voilà la matinée tant attendue, je marche d’un pas nonchalant avec le cœur qui palpite … et je remarque plusieurs choses, notamment les indications sur la grille d’entrée qui jouxte un entrepôt : le lieu serait-il surveillé, avec caméras ? Même si le grillage est ouvert, le portail est cadenassé et cette installation est toute récente. J’ai un coup de froid, je n’ai quand même pas fait tout ce trajet pour rien ! Je me propose de faire un détour par les champs pour éviter de me faire remarquer par d’éventuelles personnes travaillant dans cet espèce de blockhaus. Le site est quand même ouvert à tous les vents, je m’approche et je vois des espèces de poteaux un peu partout dans le parc … mince, des détecteurs de mouvement ? Non, je constate que ce sont des lampadaires qui éclairaient tout simplement un mini-golf, dont on peut voir ce qu’il en reste. J’ai du mal à croire que je me trouve là où je suis, je suis enthousiaste, extatique et je fais le tour des lieux, la porte d’entrée est accessible … je la pousse et … je la referme, pour la rouvrir, tellement je n’en croyais pas mes yeux …

Ce hall est tout juste magnifique, je ne peux m’empêcher de piaffer toute seule, j’ai le sourire, je me sens comme une enfant le matin de Noël … je me fie à mon intuition pour « tâter le pouls » de l’endroit. Je suis seule. Je commence donc à déballer le matériel, et commence la prise de vue, en espérant pouvoir tout faire sans être importunée. Je commence par la partie qui est à ma droite, je monte les escaliers, tout en continuant de shooter les petites pièces qui ne comprennent que de simples baignoires privatives et là …

Je ne pensais pas le trouver si vite. Un grand bassin s’offre à moi, immense, dans son éclat bleuté si ce ne sont les deux affreux graphs qui ont été peints ces derniers mois. Il est entouré des petites cabines vestiaires dans lesquelles on peut encore y trouver suspendus des peignoirs de bain bleus (véritables reliques ou mises en scène ?). C’est juste splendide. J’y reste un bon bout de temps avant de reprendre la visite, même si l’oreille tendue, des bruits peuvent me mettre en alerte : certains oiseaux font quand même de drôles de cris qui peuvent s’apparenter à des alarmes. Mais j’aime l’ambiance de cet endroit, je ressens des ondes calmes et reposantes, c’est léger, ça me plaît.
Au niveau de l’autre aile, des petites pièces avec plusieurs baignoires, dont certaines servent d’entrepôts à des vieilles bouteilles, l’eau de source locale était produite sur place. Je n’ai jamais entendu parler de cette eau, en passant, je trouve des étiquettes plus ou moins récentes, des capsules argentées. Au premier étage, des pièces servant pour les services médicaux, salles d’attente, salles d’examens remplies de livres anciens, et même des tables d’accouchement !
En haut se trouvent les chambres des curistes, avec tout le mobilier à l’intérieur, on pourrait même limite y faire la sieste si les couvertures n’étaient pas moisies ! Je fais très attention à faire le moins de bruit possible, j’ai désactivé les sons de mon appareil, et j’ai peur que les clics de mon déclencheur me fassent remarquer.
Galerie photo Thermes
Le reste du domaine
Il ne s’agit pas là uniquement d’un seul établissement mais de tout un complexe. Voici une typographie des lieux en 1974 :

1 : Bâtiment des thermes + Piscine
2 : Hôtel
3 : Petit château
4 : Maison (bâtiment administratif)
5 : Mini-golf
Les clients les plus fortunés pouvaient séjourner dans un hôtel de luxe, également accessible, mais hélas peu de choses à voir. Visiblement des travaux de rénovation ont été entrepris, pour être délaissés … J’ai été attirée par la cage d’ascenseur à l’ancienne, mais ce dernier a été malheureusement remplacé par un modèle plus moderne lors des travaux.
Les chambres sont donc vides, les murs à moitié plâtrés. Reste un sous-sol un peu sinistre avec quelques bouteilles d’époque.
Pourtant, alors que je prends des photos à cet endroit, mon appareil bugge !!! Impossible d’avoir accès à l’écran pour régler mes clichés, j’ai beau l’éteindre et le rallumer, pester, il me fait ce caprice, là, en pleine exploration … pourtant, sortie du sous-sol, il fonctionne à nouveau, comme par miracle. Étrange …
D’après les infos que j’en ai tiré, l’hôtel a fait l’objet d’un incendie dans les années 80, d’où le chantier, et la mise en liquidation des eaux a eu raison de la fin.
Galerie photo hôtel
Épilogue
Je me dirige vers le petit château. Si je fus ravie qu’il soit accessible j’ai tiré la grimace en entrant … le sol est complètement rongé par le temps, il y a des trous dans le plancher, j’essaie d’avancer en rasant les murs mais je n’aime pas le grincement qui en résulte. Je joue la carte de la prudence, je suis seule, j’avais vu tantôt que le réseau ne passait pas, s’il m’arrive quelque chose, je suis mal, et puis j’avais déjà fait le plus important. D’autant plus que je suis tombée sur une vidéo de deux urbexeuses qui n’en mènent pas large en le visitant, tant cet endroit est abîmé.
Tant pis. Mais quand je redescends, une mauvaise surprise m’attend, j’entends les aboiements d’un ou plusieurs chiens, il y a bien une maison habitée un peu plus haut, je redescends discrètement et me fais petite, le temps que ça cesse.
Je visite le dernier bâtiment, une maison, qui devait servir de bureaux pour la société qui distribue l’eau de source. Il y a des présentoirs et des photos du produit, on pourrait penser qu’ils vendaient du parfum, probablement des eaux de luxe à 30 euros la bouteille. Je ne sens pas cet endroit, je ne prends pas de photo, après tout ce que j’ai vu ça me semble dérisoire. Je refais un dernier tour extérieur et jette un œil sur la fontaine, l’installation semble toujours marcher car les pompes sifflent. Cette partie est inaccessible malgré mes recherches. Je décide alors de repartir, d’autant plus que je gèle sur place et la pluie menace, contente après quelques heures d’exploration. Je n’ai pas envie de me prendre la tête, je passe devant l’entrepôt qui est vide. Mais là, je remarque que le portail est ouvert, alors qu’il ne l’était pas ! Des gens sont donc entrés dans le domaine.
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